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Exclusif. Mission d’observation de la Ligue arabe : le contre-rapport de l’opposition syrienne

En Syrie, l’armée n’a pas retiré ses troupes des villes ni arrêté de tuer quotidiennement des civils. Les arrestations massives des manifestants n’ont connu aucun répit. Le constat est établi par le Conseil national syrien (CNS, opposition syrienne) dans un contre-rapport de 22 pages, rendu public jeudi 19 janvier, dont une copie a été remise à El Watan Week-end, sur la mission d’observation de la Ligue en Syrie. Alors que la mission  officielle a rendu, le même jour, son rapport à la Ligue arabe.

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Par Fayçal Métaoui

Le document qui couvre la période allant du 24 décembre 2011 jusqu’au 7 janvier 2012, relève que les snippers du régime et les hommes armés ne sont pas sortis des villes et des quartiers durant cette période. «Ils ont procédé au changement de la couleur des engins militaires en les dotant d’armes à moyenne portée. Ils ont continué à tirer sur les manifestants et à utiliser sans raison la violence malgré la présence des observateurs arabes. Les victimes sont tombées chaque jour avant et après la venue de ces observateurs», est-il relevé. Il est remarqué que les arrestations et les persécutions des civils n’ont jamais cessé. «Des civils soumis à toutes les formes interdites de torture. Le but de la torture est de casser le moral et les capacités physiques des détenus pour les dissuader de revenir aux manifestations dans les rues. Des personnes sont mortes sous la torture. Aucun détenu n’a été libéré.»

«La mission d’observation n’a pas visité les prisons et les lieux d’incarcération dépendant des annexes sécuritaires se contentant d’inspecter les prisons judiciaires réservées aux détenus poursuivis pour des affaires pénales comme à Damas, Homs et Hama. Les observateurs ont rencontré des prisonniers de droit commun et pas des manifestants ou des détenus d’opinion», est-il encore indiqué. Le contre-rapport cite des prisons où la mission ne s’est pas rendue. Il s’agit, entre autres, des prisons de la sécurité d’Etat (qui dépend de la présidence de la République syrienne), des lieux de détention des renseignements militaires (état-major des forces armées), des prisons de la police politique (qui relèvent théoriquement du ministère de l’Intérieur), des centres d’incarcération des services secrets de l’armée de l’air et les prisons spéciales que supervise le général Maher Al Assad, le frère du président syrien. Les prisons spéciales (qui échappent à toutes les règles de droit reconnu au niveau universel) se trouvent notamment sur la route entre Damas et Beyrouth. L’évolution sur le terrain de la mission a été freinée par des snippers qui n’ont pas hésité à ouvrir le feu sur les observateurs comme ce fut le cas à Arbine.

Des médias triés sur le volet

Selon le même rapport, les médias arabes et internationaux ont été empêchés d’entrer en Syrie pour y effectuer des reportages journalistiques. «Le régime s’est limité à donner des autorisations à des chaînes de télévision qui défendent ses thèses et qui évoquent les événements en Syrie avec peu d’objectivité et de professionnalisme», est-il noté. Il s’agit principalement des chaînes de télévision russes et chinoises. L’opposition syrienne relève aussi que le déplacement des observateurs arabes a été perturbé par tous les moyens. «Le régime a tout fait pour que la mission n’arrive pas sur les lieux des manifestations et des regroupements pacifiques au moment voulu. A chaque fois, des rassemblements sont organisés pour faire perdre du temps et présenter des faux témoignages de gens proches du gouvernement. Des témoignages bâtis sur aucune preuve», est-il indiqué. Le déplacement motorisé des observateurs a été, selon la même source, bloqué à chaque fois. «Et à chaque fois, on prétextait l’existence de zones sécurisées et de zones non sécurisées. Les communications des observateurs, à chaque fois coupées, ont été mises sous contrôle. Toute personne qui contactait la mission était poursuivie», est-il relevé.

Selon l’opposition, des agents de sécurité, des policiers et des informateurs n’ont pas quitté les délégués de la Ligue arabe dans toutes les inspections. «Ils ont interdit à la population de s’approcher de la mission. Les gens étaient parfois tenus à l’écart à plus de 100 mètres. Dans les zones non maîtrisées par les forces du régime, les citoyens ont pu discuter avec les observateurs, livrer leurs témoignages, fournir des photos et des documents», est-il affirmé. Souvent, le régime a induit en erreur les observateurs en leur parlant de présence de «groupes armés» (la fameuse thèse sur «le terrorisme»). «L’objectif de cette manipulation est de faire croire que la révolution n’est pas pacifique, mais armée. Une manière de mettre sur un pied d’égalité la victime et le bourreau», est-il écrit.

Manque de moyens

Des militants anti-régime ont constaté sur place que la mission de la Ligue de arabe a souffert de faiblesses logistiques (manque de caméras, d’appareils GPRS, d’ordinateurs portables…). «Des experts en médicine légale, des psychologues et des militaires manquaient à la mission. La plupart des membres de la mission ne sont pas habitués à ce genre de travail sur le terrain. Il est important de faire appel à des experts des organisations internationales spécialisées, ceux qui ont l’expérience du Kosovo, de la Serbie, de l’Afghanistan, du Rwanda et du Burundi», est-il préconisé. L’opposition remarque que le nombre de véhicules mis à la disposition de la mission n’était pas suffisant. «Il est impératif de choisir des chauffeurs et des accompagnateurs neutres, n’ayant aucun rapport avec le régime, pour qu’ils ne servent pas d’informateurs et d’espions. Il est nécessaire aussi d’avoir un réseau de communication sécurisé en dehors du système national syrien», est-il rédigé. L’opposition propose par exemple l’utilisation des mobiles satellitaires Thuraya difficilement détectables à l’écoute extérieure de type policière. Le contre-rapport précise que les opposants ont eu beaucoup de mal à communiquer avec les délégués de la Ligue arabe en raison d’un manque d’information sur leurs numéros de téléphone et leurs lieux de résidence et de travail.

6368 tués et 17 710 détenus

Selon le Centre de documentation sur les cas de violation en Syrie, qui renouvelle chaque jour ses informations sur son site, le nombre de morts, à la date du 19 janvier 2012, est de 6368 depuis le début du soulèvement populaire contre le régime de Damas le 15 mars 2011. D’après la même source, les enfants tués par les militaires syriens sont au nombre de 424, dont 82 fillettes. Ils sont 17 710 à être détenus sans jugement, la plupart à Damas, Rif Dimashq (campagne de Damas), Daraa, Homs, Hama et Idleb. Le site publie une liste nominative des victimes et des détenus. Les derniers tués, hier, sont Moussa Ahmed Al Ibrahim à Deer Ezzour, Thamer Bayttar, Abdelaziz Mohamed Al Aouani et Omar Badawi Zaarour à Homs. Le document est accompagné d’une annexe renvoyant vers des liens internet (textes et vidéos) où des témoignages sont livrés sur des horreurs imputables à des soldats et des policiers syriens. Parmi les documents mis en référence, une lettre de la Coordination de la révolution syrienne appelant les Nations unies à une protection internationale des civils.

En savoir plus : L’interview de Anouar Malek, membre démissionnaire de la mission arabe en Syrie .

4 commentaires sur “Exclusif. Mission d’observation de la Ligue arabe : le contre-rapport de l’opposition syrienne

  1. Rabah
    janvier 20, 2012

    Finalement, c’est M. Anouar Malek qui avait raison.

    Vive la jeunesse, qui apporte un air frais et vivifiant à notre pays étouffé par les vieux chnoques qui le gouvernent.

    Le vieux c.. de Medelci l’a eu dans le baba et s’est fait, une fois encore, avoir par la Ligue Arabe et la Syrie en affirmant stupidement que l’armée syrienne s’était retirée de certaines villes et avait relaché les prisonniers politiques.

    Il a même osé renvoyer dos à dos le bourreau ( le régime sanguinaire de Bachar Al Assad ) et la victime ( le peuple syrien ), comme l’a fait son collègue russe, qui va enfoncer le peuple syrien dans une tragédie que l’Histoire ne pardonnera jamais aux mafias algérienne, iranienne, russe et chinoise, qui soutiennent et arment le bourreau de Damas.

    Mais la victoire viendra à la Syrie de Homs, comme elle était venue à la Lybie de Benghazi.

    Tenez bon frères et soeurs syriens, le bout du tunnel n’est plus loin et n’oubliez surtout pas qu’aucune dictature n’a resisté à un peuple uni et décidé.

    Allah maakoum !

  2. fouad
    janvier 20, 2012

    dans cette sale revolte fratricide sans objectif la victime c’est bien la syrie ,

    • Lindah
      janvier 20, 2012

      Et le dindon de la farce, c’est bien l’Algérie car lorsque la massue s’abattra sur sa tête (incha Allah le peuple algérien se réveillera avant la catastrophe annoncée et chassera ses tyrans avant qu’il ne soit trop tard ), comme l’a dit le Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères qatati à Medelci, au Caire, lors d’une réunion de la Ligue Arabe, elle va se retrouver seule.

      Pour une fois dirigeants autoproclamés de notre pays auraient bien fait de suivre les conseils du Qatar.

      Par contre les conseils que ce pays leur a donnés et qu’ils ont suivis auparavent, concernant la chasse de l’outarde, les déplacements ridicules de bouteflika à Doha et à Tunis, pour y rencontrer Abdeldjellil et Marzouki et s’excuser auprès d’eux , dans des conditions humiliantes, d’avoir soutenu Kadhafi et Benali et la mediation du Qatar pour la normalisation de nos relations avec le Maroc, étaient catastrophiques pour notre pays, dont la diplomatie fait naufrage et prend eau de toutes parts.

      Plus maudits que les dirigeants qui nous sont imposés depuis 1999, tu meurs !

  3. Omar
    janvier 24, 2012

    Si vous croyez que quoi que ce soit de bon peut venir des emirs et monarques du Golfe, c’est que vous croyez au pere noel. Ces rois du Golfe recoivent leur ordres de Washington qui recoit ses ordres de Jerusalem, tout le reste est du baratin. Les republiques arabes comme l’Algerie, la Tunisie, La Syrie etc qui restent dans la Ligue Arabe font une grave erreur, c’est une ligue de traites et de laches qui se retourneront contre vous a la moindre occasion.
    Je crois que la Syrie est victime d’une machination et les auteurs c’est les pays arabes.

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Cette entrée a été publiée le janvier 19, 2012 par dans Actu.